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Les impatientes de Djaïli AMADOU AMAL

C’est une lecture commune que j’ai faite avec une amie de la fac de pharmacie. Je l’ai donc fait un peu plus durer sur la longueur. Nous avions décidé de faire 3 chapitres par soir et de nous attendre pour pouvoir échanger librement au cours de la lecture. De fait, j’ai pris mon temps. J’avais également plus de retenue dans ma lecture.

Pour autant, cela ne m’a pas gâché ma lecture, même si c’était dur de se tenir à quelques chapitres chaque soir. Heureusement, j’avais une autre lecture en cours. Parfois, je ne lisais pas un soir pour en avoir plus à lire un autre soir. Et puis, j’avais aussi des services presses à rendre.

Mon avis

J’avais adoré « Cœur du Sahel » ; une lecture audio marquante, souriante et triste.

Djaili Amadou Amal avait commencé sur le statut de la femme au Cameroun, que j’avais déjà trouvé assez dur sur le sujet. Les concessions me paraissaient une construction sociale d’un autre siècle. Le livre « Les impatientes » est encore plus dur, plus cru, violent, sanguin. C’est un tout autre niveau. Elle invite son lecteur dans sa vérité. Avec trois héroïnes, trois femmes aux quotidiens bien différents, Djaili Amadou Amal nous plonge dans leur intimité. Son roman est corrosif, franc… Elle poignarde à vif cette société masculine qui étouffe, violente et tue ses femmes sans craindre aucune répercussion. Elle ne fait pas de concessions. Pourquoi en ferait-elle ?

Djaïli Amadou Amal est cruelle envers cette société d’hommes sans respect. La femme est objet de négoce. C’est un moyen d’obtenir un statut, des terres, de négocier des chameaux… Le père décide, la fille s’aligne. Le consentement n’existe pas, pire encore sa voix ne s’entend pas. Retour aux moyen-âge. Elle endure tout avec patience : munyal, ma fille ! Comme si ce n’était pas assez, elles vivent recluses. Elles mangent entre elles et loin du regard des hommes, car ce sont des êtres impurs, leurs gestes aussi.

En tant que femme, je me suis sentie glacé par ce discours, car ce sont les mots des hommes que l’on inculque aux jeunes camerounaises et autres femmes africaines. C’est réel, il n’y a donc aucun moyen de fuir l’horreur de ces mots.

Heureusement, je vis en Europe, et j’ai le droit de dire non, de ne pas me marier, de flirter avec qui je veux et si je veux. Mes sentiments comptent. Le mariage forcé n’existe plus. La loi est de mon côté si mon père essayait de me contraindre. Si mon mari porte la main sur moi, ma mère ainsi que mon père seraient les premiers à me tendre la main et m’aider. La loi et le système pénal condamneraient mon agresseur de mari. Au Cameroun, le père détourne le regard et le mari s’en donne à cœur joie. La mère fait l’aveugle ou s’insurge et se fait répudier. Il y a de quoi être glacé jusqu’à l’os, vous ne trouvez pas ?

Ce livre comporte pas mal de Trigger warnings. Djaili Amadou Amal ne fait pas dans la dentelle, pourtant elle n’en fait pas trop. Cette violence n’est pas de trop, elle est dosée, réfléchie et surtout elle est réelle. Le lire n’est qu’un aperçu. Je voudrais qu’il soit mis entre toutes les mains, mais les enfants des collèges risquent d’être choqués. Ce n’est pas le but.

Il faut avoir le cœur bien accroché. J’ai parfois posé le livre pour souffler face à l’horreur. J’ai eu envie de prendre les protagonistes dans mes bras, de les réconforter, mais aussi de sortir les griffes pour les défendre. J’étais également prête à tendre l’oreille, les écouter, car leur voix compte.

Les autres femmes ne peuvent aider. Ce sont des concurrentes, toujours prêtes à se réjouir du malheur de leur rival, car elles pourront par la même occasion acquérir un statut plus enviable comme celui de première femme. Elle ne peut se fier à personne.

Et l’homme peut être doux, peut être aimant comme un père, mais jamais plus impliqué que cela. Pourtant ce même homme va vendre sa fille au plus offrant : à un drogué, à un alcoolique doublé d’un violeur. Et ceux sans états d’âme, c’est triste et horrible.

Djaili Amadou Amal arrive à nous raconter ses histoires, ses portraits de femmes avec toute sa sensibilité. Pourtant, en tant que femme féministe, elle fait aussi preuve de critique  ainsi que d’une certaine acidité. Elle dénonce une situation scandaleuse, primitive et cruelle envers les femmes. De sa plume, elle prend son arme et vise. Son combat est noble. L’auteure ne se contente pas d’écrire. Cette femme fait bouger les choses. Elle lutte pour l’éducation des femmes et leur indépendance, je suis impressionnée par son parcours.

Ce récit est engagé. Il donne la parole aux femmes. Ce sont des mots écrits, des mots qui vous toucheront. J’espère qu’il soulèvera les consciences et redonnera la ouïe à ces hommes et ces femmes qui ont décidé de faire la sourde oreille.

Ce livre a reçu le prix Goncourt 2020 des lycéens et pour moi, il le mérite amplement. Il doit être lu au lycée, pour rejoindre le combat de Djaili Amadou Amal. Un livre comme celui-ci est autant de la dénonciation qu’un appel à ne pas régresser. Notre société a encore beaucoup à faire pour le droit des femmes.

En résumé

Djaili Amadou Amal dénonce de manière percutante la condition des femmes au Cameroun à travers son roman, exposant la cruauté d’une société masculine oppressive et rétrograde.

Note

Note : 4 sur 5.

Citation

«  Non, ce sont tout simplement tes frères car je les ai aimés, protégés et élevés comme les miens. J’ai hérité des trois enfants de Hidaya, j’ai aussi hérité des assiettes qui remplissaient son armoire, j’ai hérité des meubles offerts par notre père à son mariage, j’ai enfin hérité de son époux mais surtout de ses trois coépouses ! Patience ! On me l’a répété si souvent. Nos rivalités de coépouses non seulement ne connaissent jamais de fin, mais même une trêve est impossible car chaque rivale attend impatiemment la faille pour déstabiliser son ennemie. J’ai appris à me protéger de tous. »

Extrait de
Les impatientes
Amadou Djaïli Amal

Synopsis

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Bonne lecture !

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Passionnée de livre... Fantasy, Policier et Romance :)

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17 commentaires

  1. […] Les impatientes de Djaili Amadou Amal […]

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