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Premier paragraphe # 19

Cher(e)s voyageur(e)s,

Aujourd’hui, on se retrouve pour le rendez vous premier paragraphe. Je ne vais pas vous donner le premier paragraphe mais le premier chapitre d’un livre…à deviner. Je vous donne des indices en bas de l’article si besoin ;).

20 septembre 1991

Sun Tang avait les pieds dans l’eau.

Ses bottes étaient usées, trouées, mais elle n’avait que celles-là. Depuis deux heures, elle se penchait, donnait des coups de faucille, et récoltait les panicules de riz. À chaque mouvement, un cri étouffé sortait de sa bouche. Elle avait mal, très mal. La chaleur l’assommait, et malgré son chapeau en bambou, elle était prise d’étourdissements.

– Rrrrr…

Un peu plus loin, la vieille Zhen venait de pousser un grognement. La pauvre femme était accroupie dans la boue, suante et les habits terreux. Un foulard enroulé autour du crâne, elle soufflait comme un âne à l’agonie.

– Madame Gong…

Sun fit un pas vers elle, mais la vieille lui tourna le dos, dans une totale indifférence. Cela n’avait rien d’étonnant. Depuis la mort de son mari, quatre ans plus tôt, Zhen Gong ne parlait à personne et n’aimait que son fils. Elle ne mettait le nez dehors qu’en automne, quand les femmes du coin moissonnaient. Le reste du temp, elle endossait le costume de la matriarche tyrannique, et persécutait sa belle fille à longueur de journée.

Sun Tang s’immobilisa et leva les yeux vers le village.

Construit à flanc de montagne, Mou di était entouré d’innombrables rizières en terrasse qui semblait dégringoler comme des cascades en gradins. De tous côtés, des monts boisés jaillissaient vers le ciel, masqué par les brumes matinales.

Sun habitait la depuis plus de six ans, et pourtant elle trouvait ce paysage toujours aussi grandiose et surréaliste.

Elle posa une main sur son ventre bombé.

– Je sais que tu n’aimes pas, murmura-t-elle, mais je n’ai pas le choix. Tu comprends ?

Comment aurait-il pu comprendre, il n’était même pas né ! Depuis quelques jours, Sun sentait que son état se dégradait, comme si son ventre allait se déchirer pendant l’effort. Sous son nombril, le futur nouveau-né se débattait, alors que sa mère refusait de prendre du repos. Car même à huit mois et demi de grossesse, Sun avait l’obligation de travailler dans les rizières et ce dimanche compris.

– Maman! Maman !

Les cris de Chi-Ni alertèrent la jeune femme. Plus haut sur la colline, sa fille de six ans faisait de grands gestes pour attirer son attention.

Ce n’était pas bon signe…. Chi-Ni ne dérangeait jamais sa mère au moment des récoltes.

– Maman, viens vite !

Sun laissa tomber sa gerbe de riz avant de se précipiter vers le village sous l’oeil intrigué de la vieille Zhen. Cent mètres plus haut, elle saisit l’épaule de sa fille, qui semblait à deux doigts de pleurer.

– Chi-Ni que se passe-t-il ?

La petit tremblota en entrouvrant la bouche. Sun l’avait rarement vu dans cet état. Chi-Ni était une enfant courageuse, qui savait surmonter ses peurs.

– Ma chérie, je suis là, réponds-moi !

– Des cris… J’ai entendu des cris !

Indice 1: l’auteure est française

Indice 2: c’est son premier roman

Indice 3 et non des moindres : c’est un de mes coups de cœur 2017 (livre lu en été). https://lesparaversdemillina.com/bilan-de-lecture-2017/ Il est aussi chroniqué.

La réponse est (souligné pour révéler) :

Les petites filles de Julie Ewa

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