Le mardi sur son 31 #20

Cher(e)s Voyageur(e)s,

Le principe est de présenter une citation extraite de la page 31 de ma lecture en cours. La citation est sensée être une phrase. Je préfère que ce soit un peu plus long.

Ce rendez-vous hebdomadaire a été créé par Les bavardages de Sophie. Je participerais à ce rendez-vous ponctuellement, quand l’occasion se présentera.

Voici un extrait de la page 31 de Quel gâchis, inspecteur de Charles Exbrayat :

« — Allons, allons, Chris… Ne me faites pas dire ce que je ne dis pas. Tout autant que vous et pour d’autres raisons peut-être, je serais heureux de renvoyer Davis au trou. Seulement, pour s’exercer, la justice a besoin, exige des preuves.

— Je les trouverai !

— Je suis sûr du contraire, Chris, et je ne puis vous permettre de perdre votre temps dans une voie sans issue.

— À vos ordres !

Raidi de colère, Mortlocke se leva, salua froidement son supérieur et sortit de la pièce. Au moment où il en franchissait le seuil, le superintendant lança :

— Chris… Cette institutrice vous occupe trop l’esprit pour l’instant. Permettez-moi un conseil…

— Je ne vous le permets pas, sir !

A son tour, Richard Bolton sentit la moutarde lui monter au nez. Mais c’était un homme froid, paisible, qui réfléchissait toujours beaucoup avant d’agir. Il ne rappela pas Mortlocke et se contenta de soupirer, car il éprouvait une réelle affection pour Chris et s’inquiétait de le voir s’embarquer sur des chemins ne menant nulle part. »

Bonne lecture !

Premier Paragraphe #67

Cher(e)s voyageur(e)s,

Voici le premier paragraphe de Quel gâchis, inspecteur ! de Charles Exbrayat :

« L’inspecteur Christopher Mortlocke ne passait pas, parmi ses collègues du Yard, pour un joyeux drille. Depuis dix ans dans la police, Chris n’avait jamais pu se faire un ami, car jamais il n’avait rencontré quelqu’un capable d’aller au-delà de son air morose, de son apparente indifférence, de son humeur peu aimable. Tous ceux ayant essayé de nouer avec Mortlocke des relations sur un autre plan que celui du métier durent abandonner leurs tentatives. Lorsque l’inspecteur s’était marié, quelque cinq années plus tôt, seul l’inspecteur-chef Richard Bolton avait assisté à son mariage. Les autres se contentèrent de plaindre la jeune épousée, Suzan, en se demandant ce qui avait bien pu la séduire dans la terne personnalité de Chris. Ce dernier ne possédait quoi que ce soit pouvant attirer le regard ou retenir l’attention, ce qui est parfait pour un policier en vue de ses tâches journalières, ce qui l’est moins pour plaire à des jeunes femmes aussi écervelées que Suzan. Ce qui devait arriver arriva, après deux années passées auprès de Chris, dans l’espoir qu’il deviendrait quelqu’un, la jeune femme était partie. Sans doute se figurait-elle qu’un homme du Yard ressemblait à ces détectives privés qui encombrent le folklore cinématographique et qui ne descendent de confortables automobiles que pour entrer dans des restaurants à la mode. Au lieu de cela, elle se rendit compte que son mari n’était qu’un fonctionnaire comme tous les fonctionnaires britanniques. Elle s’avoua, la rage au cœur, qu’elle aurait tout aussi bien pu épouser un postier ou un employé d’un quelconque ministère. Elle finit par le dire à Chris en même temps qu’elle lui annonçait son intention de divorcer. Avant de donner sa réponse, il s’examina longuement dans la glace de sa chambre. De taille moyenne, il ne ressemblait en aucune façon à un acteur de cinéma, mais à l’Anglais quelconque qu’on rencontre par milliers d’exemplaires à l’heure de la rentrée ou de la sortie des bureaux. S’il portait un chapeau mou plutôt qu’un melon, cela ne le nimbait pas d’un air plus romantique pour autant. Sa force physique n’avait rien d’exceptionnel et son visage se révélait assez quelconque pour passer inaperçu. Il n’aimait guère s’amuser et rêvait d’un foyer où on le dorloterait, où une femme dévouée lui donnerait de solides garçons qui deviendraient de bons policiers. Il convint que de toute évidence, Suzan ne pouvait jouer ce rôle et lui rendit sa liberté. De ce petit drame, très peu parmi les collègues de Mortlocke furent au courant, et ceux qui l’apprirent ne s’en soucièrent guère ou au contraire, ricanèrent en déclarant que ce n’était pas étonnant car, à leur avis, ils ne voyaient pas comment quelqu’un de bien équilibré pouvait vivre aux côtés de l’inspecteur Chris Mortlocke. Seul, l’inspecteur-chef Richard Bolton soupçonna le drame et au lendemain du prononcé du divorce convoqua son subordonné. Pour la première fois, il l’appela par son prénom. »

Bonne lecture !