Premières lignes n°214

« Ses doigts serraient le bord du bastingage et se crispaient de plus en plus sur le bois à mesure que le bateau approchait du port. Anne connaissait le moindre méandre de l’embouchure de l’Elbe pour y avoir souvent navigué, enfant, avec son père. Glückstadt, les îles fluviales de Schwarztonnensand, Pagensand et Bishorter Sand, puis Wedel et Neßsand. Elle les distinguait à peine, l’épais brouillard matinal ne révélait qu’une esquisse des rives. Leur voilier dépassait justement l’île de Finkenwerder et Anne distingua quelques maisons de villégiature, ombres vagues derrière un voile de gaze. Non seulement le brouillard effaçait le paysage, mais il avalait aussi les sons ; on n’entendait que l’eau qui clapotait contre la proue, le grincement des vergues et les légers cliquetis des cordages gelés cognant contre le mât. Comme sur un bateau fantôme, ils fendaient la brume pour s’approcher de Hambourg presque sans un bruit, à peine visibles. »
Extrait de
Les Femmes du dispensaire
Henrike Engel
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